Il y a des livres qui sont sans temps, dont les thèmes  sont toujours actuels . C’est le cas de Madame Bovary, le chef-d’œuvre de Gustave Flaubert. Bien qu’il l’ait publié en 1856, il y a presque deux siècles, on peut réfléchir sur ces thèmes et faire des comparaisons entre le passé et le présent.

Quand on parle d’Emma Bovary, on pense immédiatement à l’insatisfaction, qui la conduit à rêver une vie complètement différente de la sienne.

A travers cette héroïne, Flaubert décrit un état d’âme, une condition existentielle qu’on a appelé le « bovarysme ». Il s’agit d’un sentiment d’angoisse et de déception qui naît du décalage entre ses propres aspirations, ses idéaux et la vie réelle. D’ailleurs, Madame Bovary n’est pas la seule à rêver une vie différente. L’esprit est difficile à contrôler, ce qu’on rêve est souvent impossible à réaliser et, quand on se rend compte qu’il s’agit simplement d’illusions, on éprouve une profonde tristesse et une grande déception.

Beaucoup de philosophes et de psychanalystes se sont interrogés sur la nature du « bovarysme », un état de malaise et de maladie ou bien une tendance naturelle de l’esprit de l’homme. Cependant, il est important de souligner qu’un bon nombre de psychanalystes ne voient pas le bovarysme de manière négative, mais au contraire, ils affirment que le bovarysme est même utile à l’être humain parce qu’il le pousse à effectuer des changements positifs dans sa vie.  A cause de son insatisfaction, l’homme est poussé à faire de son mieux pour devenir quelqu’un d’autre et obtenir ce qu’il veut.

Ainsi, les opinions à ce sujet sont divergentes.

 Par exemple, en s’inspirant au personnage d’Emma, Jules de Gaultier, philosophe français et auteur d’un traité « Le Bovarysme, essais sur le pouvoir d’imaginer », développe sa théorie sur le « désir de désirer ».  Dans son essai, le philosophe écrit que le bovarysme est «le pouvoir départi à l’homme de se concevoir autre qu’il n’est», ce qui représente une forme d’aliénation. Selon Jules de Gaultier, il y a des hommes de premier ordre qui sont leur propre modèle et des hommes de second ordre qui imitent les autres, qui empruntent des personnalités. L’existence d’Emma est influencée par les lectures romantiques de son adolescence. Les héroïnes des romans qu’elle lit deviennent le modèle qu’elle veut suivre. Elle cherche, donc, à les imiter par tous les moyens, même par le biais de l’adultère et des dépenses inutiles. Elle fait tout cela, uniquement pour mener une vie qui ne lui appartient pas.

Ainsi, à cause de ses conséquences, Madame Bovary est considérée comme une “mauvaise lecture”. Cependant, il faut dire que certains auteurs, comme Daniel Pennac, ne sont pas d’accord . En effet, il place le droit au bovarysme parmi les droits du lecteur. Il ne condamne pas Emma Bovary, mais plutôt la justifie, considérant son comportement parfaitement normal et, surtout, typique de l’adolescent qui lit un roman et se laisse emporter par l’histoire. Pennac définit le bovarysme comme une « maladie textuellement transmissible ».

On peut encore parler de bovarysme aujourd’hui. En effet, tout comme Emma rêvait d’une vie comme celle de ses héroïnes, les jeunes d’aujourd’hui rêvent du style de vie des personnages célèbres qui s’exposent sur les réseaux sociaux, en particulier sur Instagram. Maisons de rêve, vêtements coûteux, voitures de luxe : leur vie semble parfaite, mais ils s’arrêtent aux apparences, comme Emma qui pense que les aristocrates sont toujours satisfaits de leur vie. Pour ma part, je pense que les bons modèles à suivre sont ceux qui incitent et donnent la force d’atteindre nos objectifs. Il ne faut pas rêver de choses impossibles ou absurdes, mais il faut avoir des objectifs concrets et réalisables par la persévérance…faute de quoi, on finira comme Emma !